Noël coïncide
également avec la fin de l’année scolaire. Au Pérou, tandis que l’on
range les crayons, déchire ses cahiers (pour le recyclage !), on fait
chauffer les marmites pour la CHOCOLATADA et
l’on se pomponne pour les promociones!!!
A l’heure où nous vous parlons, nous en sommes à notre
cinquième chocolatada… En quoi consiste la chocolatada - on vous sent impatients
- : en un chocolat chaud bien sûr, agrémenté de cannelle et accompagné
d’un copieux morceau de panetón, cette grosse brioche
italienne farcie de fruits confits, que rico… La chocolatada serait bien
triste sans les chants et les danses qui viennent animer ces fêtes. Dans les
écoles, chaque classe tient sa propre chocolatada avec sa
propre organisation (trois voire quatre réunions de parents sont nécessaires
pour se mettre bien bien d’accord). La chocolatada
de Louis s’est révélée exceptionnelle ! A dix-huit heures, nous arrivons
dans une classe joyeusement décorée, le son de la musique est à fond et
maîtresses (parfois déguisées) et enfants se trémoussent avec une énergie
inouïe pendant trois heures en mangeant des bonbons et en buvant du sprite [espraït] (carburant indispensable au
trémoussage susnommé). La séance est très, très animée (croyez-nous) surtout au
moment de la hora loca (véritable
institution, nous avons pu depuis nous en rendre compte) où trois hurluberlus
(dont la prof de computación) déguisés en arlequins à
paillettes, débarquent en dansant avec sifflets, ballons, cotillons … La fiesta se termine, vers 21 heures, par la
distribution des cadeaux (deux réunions pour le choix et le montant des
cadeaux). Les filles ont des genres de « Barbie » et les garçons des genres
de « Ken » qui fait la guerre avec des variantes plus pacifiques de
« Ken » qui fait du patin à roulettes ou du surf… Louis et Julien
étaient vraiment ravis et cela faisait grand plaisir de les voir si contents.
Les grands de sexto
grado (équivalent pour l’âge de la sixième française) n’ont plus de chocolatada, ils ont leur promoción ! Le passage du primaire au secondaire est
très marqué au Pérou. La promoción est une chose
sérieuse avec laquelle on ne mégote pas… les demoiselles sont coiffées,
maquillées, parées de leurs plus beaux atours (souvent loués pour l’occasion),
les jeunes gens sont parfumés, gominés, en costume-cravate. C’est à la fois
amusant et très touchant de voir tout ce beau monde arriver en mototaxi dans
leur école transformée en salle de bal à l’américaine pour l’occasion. Serge a
eu l’honneur de participer à la promoción de son école et
d’y savourer son premier pisco sour…
Entrée solennelle de chaque élève au bras d’un cavalier ou
d’une cavalière, sur fond d’un portrait de chacun lu par la maîtresse de
cérémonie, hymne national, prière, discours du directeur, des parrains de
promotion, de deux élèves de la classe (une fille et un garçon), remise d’une
médaille et d’un diplôme, toast au pisco
sour, photos de groupe, dîner général, valse pour ouvrir le bal, et même hora loca, tout cela dans le décor de
gala d’une éphémère salle de bal en tissus installée dans la cour d’école : rien ne manque pour faire de
cette soirée un évènement mémorable, à la fois solennel et déjanté.
On pourrait bien sûr, avec notre regard de
petits Français,
se demander si tant de foin - et tant de sacrifices pour des familles pour la
plupart pauvres - sont bien justifiés pour un passage au secondaire. Et
pourtant, il y a dans cette soirée de promoción un vrai rite de
passage, dont on sent qu’il fait partie de la construction de l’identité
collective des jeunes péruviens, qu’il vise à récompenser, encourager et
stimuler les efforts de chacun pour une meilleur éducation de tous (les
meilleurs de la classe ne sont du reste pas distingués lors de cette promoción, mais quelques jours après lors de la clausura, dernier
jour de l’année au cours duquel sont remis les bulletins). C’est aussi
clairement l’occasion de cultiver, pour les parents comme pour les enfants,
l’estime de soi, notion qui semble l’objet d’efforts soutenus dans les
activités socio-éducatives organisées à Manchay notamment par la Paroisse,
l’occasion aussi de cultiver la fraternité dans un pays qui il n’y a pas si
longtemps était déchiré par des violences dont il reste partout à Manchay des
traces, discrètes mais vivaces.
Devant tous ces préparatifs, ces enchaînements de fêtes,
nous sommes admiratifs, une fois encore, de cette joie de vivre et de toute
cette énergie qu’ont les Manchaynos, nous qui sommes en cette fin d’année sur
les rodillas, et tellement heureux à
l’approche des vacances…
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